Un lieu où la mort ne gêne personne
SANTÉ. Entrer dans la Maison Catherine de Longpré, c’est entrer dans un autre monde où le brouhaha de la vie quotidienne a pris une pause. C’est ouvrir la porte d’un lieu de quiétude qui laisse toute la place aux personnes en fin de vie.
Fondée en 1989, la Maison Catherine de Longpré offre des soins palliatifs et dessert les territoires de Robert-Cliche, Beauce-Sartigan et Les Etchemins. C’est un organisme sans but lucratif qui peut héberger huit personnes en fin de vie, 24 heures par jour dans une chambre privée. Elle accueille des personnes en phase terminale d’un cancer ou de toute autre pathologie, ainsi que leurs proches.
Ce qui frappe aux yeux en franchissant la porte de la Maison Catherine de Longpré, c’est la lumière qui illumine chaque recoin de la Maison. En entrant dans la salle commune, il y a, dans un coin, un cierge qui, s’il est allumé, avise qu’une personne vient de décéder. Ici, la mort ne gêne personne. Tout comme on vit, on meurt un jour, inéluctablement. Dans cette maison de soins palliatifs, les personnes en fin de vie ne meurent pas seules, à moins qu’elles le demandent.
« Ici, les patients me parlent de leur vie. Ils sont mourants, mais ils ne sont pas encore décédés. Il y a des moments de rire et de joie que je vis avec eux. Il y a du désarroi, mais aussi de la sérénité. […] On accueille les personnes là où elles en sont dans leur cheminement. Une femme de 40 ans peut dire qu’elle est prête à partir et une autre de 78 ans qui va aussi dire qu’elle est prête à partir, mais trois heures plus tard, elle ne veut plus mourir », raconte Marie Moisan, qui accompagne les personnes en fin de vie depuis cinq ans.
Du confort à la sérénité
Un toucher, un regard, un sourire rassure le patient. L’une des missions de cet organisme est d’assurer aux personnes en fin de vie et à leurs proches la meilleure qualité de vie possible et de s’assurer qu’elles partent le plus sereinement possible. Occasionnellement, des patients reprennent vie grâce à la médication qui a été bien ajustée.
« Un jour, une aînée de 98 ans qui était en fin de vie a été relocalisée dans un CHSLD et elle y a vécu quelques années avant de mourir. C’est rare, mais il y en a », souligne Mme Moisan.
Certains patients vont mourir 20 minutes après leurs arrivées à la Maison, d’autres peuvent y demeurer jusqu’à quatre mois avant de décéder, d’autres patients peuvent demander à être en sédation palliative (induire dans un coma par de la médication) ou ils sont en attente de l’aide médicale à mourir.
« Quelle que soit la façon de mourir, ce n’est jamais facile pour le patient et sa famille », précise Gaétane Veilleux, coordonnatrice des bénévoles.
Si une personne veut vivre des rituels en lien avec sa religion, la Maison va faire appel à un intervenant spirituel de l’hôpital de Saint-Georges, pour, par exemple, recevoir les derniers sacrements.
« Ce qui effraie les proches, c’est de voir la personne en fin de vie souffrir. Ils veulent qu’elle soit bien et confortable. En la soulageant, on soulage la famille », confie la directrice générale de la Maison Catherine de Longpré, Marie-Josée Gamache.
Cette dernière précise qu’il est aussi important d’accompagner la famille. En entrant dans la maison de soins palliatifs, cela peut prendre quelques jours aux proches à s’adapter au milieu et se déconnecter de la vie quotidienne.
La mort a-t-elle sa place dans la société?
« Il y a des familles qui sont en résistance face à la mort. Elles veulent l’éloigner et c’est normal, ça fait partie du processus », ajoute Mme Moisan.
Est-ce que la société est prête à parler de la mort comme on parle de la vie ? « Les gens vont réagir face à la mort de l’autre comme un miroir face à leur propre mort. Si un proche meurt, cela veut dire que je vais mourir un jour […] Comme société, comment est-ce que je vois la mort? Est-ce que la société accueille la mort? Est-ce qu’elle a envie de parler de la mort ? Je crois que non, mais il faut un jour lui faire face, on ne peut pas toujours la repousser », indique Mme Gamache.
« Ici, on lave le patient, on le nourrit, on prend tout en charge. On enlève une pression à la famille qui se sent vulnérable face à l’intimité de l’autre. On leur enlève ce souci pour qu’elle puisse vivre plus confortablement les derniers moments avec leur proche », souligne Mme Veilleux.