La protection du patrimoine : beaucoup de chemin à faire
PATRIMOINE. La culture d’une population se trouve dans sa langue, dans ses coutumes et son mode de vie. Les bâtiments construits lors des siècles derniers ; églises, hôpitaux et maisons, en sont des aspects tangibles. Mais au cours des dernières années, on a souvent vu ces traces du passé négligées, voire détruites, pour faire place à de nouvelles constructions.
Depuis quelques années, le gouvernement s’efforce de protéger et valoriser le patrimoine. La -Loi sur le patrimoine culturel, qui a été modifiée en 2021, permet aux bâtiments anciens d’être classés par le ministère de la -Culture, obtenant ainsi un statut de protection légal. Ils peuvent également être cités par les municipalités ou communautés autochtones, ce qui leur confère une protection similaire. Selon cette même loi, les -MRC peuvent aussi réaliser un inventaire de leurs biens patrimoniaux. Cependant, un bâtiment inventorié ne disposera pas de la même protection que s’il est classé ou cité ni des mêmes possibilités de financement, informe -Action -Patrimoine, un organisme privé à but non lucratif qui œuvre à protéger, à mettre en valeur et à faire connaître le patrimoine québécois.
En théorie, ces statuts devraient assurer la sécurité du patrimoine, mais la réalité est tout autre. Plusieurs bâtiments ne sont ni classés ni cités. À l’inverse, certains qui disposaient de toutes les protections nécessaires ont tout de même été démolis, faute de surveillance sur le terrain, après avoir été vendus. C’est notamment ce qui est arrivé avec le centre commercial du -Domaine-de-L’Estérel dans les -Laurentides, en mai 2022. « -Ce qui est déplorable dans ce -cas-là c’est qu’il n’y avait pas de surveillance de la part du ministère sur le terrain, sur le site, lors des travaux », indique -Félix -Rousseau, agent avis et prises de position chez -Action -Patrimoine.
De plus, le financement accessible n’est pas toujours suffisant. Les programmes existants sont ponctuels, donc à risque de ne pas être renouvelés d’une année à l’autre. Quant à l’entretien des bâtiments, il n’est pas nécessairement surveillé. Un immeuble patrimonial pourrait être cité, classé, protégé et pourtant, tomber en ruine, car mal entretenu, par faute de temps, de moyens ou de -main-d’œuvre.
Selon -Marie-Josée -Deschênes, architecte spécialisée en patrimoine bâti : « -On devrait sensibiliser en tant que société, se donner les moyens. Au niveau provincial et municipal, il faut dire aux gens de préserver les bâtiments, de préserver les -granges-étables, préserver les paysages », -dit-elle. « -Il faut que les gens en autorité éduquent la société. »
Car plusieurs n’ont pas conscience de l’importance du patrimoine et de tout ce qu’il représente selon -Sophie -Quirion, candidate à la maîtrise en histoire de l’art à l’Université du -Québec à -Montréal (UQAM). « -Le patrimoine bâti est actif sur le territoire parce qu’on l’intègre et la plupart du temps, on a un projet à l’intérieur. Il y a une communauté qui s’en sert et ça permet aux citoyens du milieu de s’en servir. Le patrimoine améliore notre milieu de vie », -estime-t-elle.
« -Le patrimoine culturel nous permet de garder collectivement notre histoire, nos racines. -Imaginez-vous si on vivait dans un monde qui serait entouré uniquement de constructions neuves, sans diversité et qui ne représentent rien sur notre époque », poursuit la -Beauceronne qui estime que le patrimoine permet également d’enseigner une partie de l’histoire du -Québec aux nouvelles générations et aux nouveaux arrivants.
D’autre part, il faut confronter l’aspect environnemental de la chose. « -Le bâtiment le plus vert, c’est celui qui existe déjà. Sa démolition et une reconstruction nécessitent des coûts environnementaux importants. Intégrer un bâtiment ancien, ça permet non seulement sa sauvegarde, mais ça évite aussi de mobiliser des ressources naturelles qui pourraient être évitées », conclut -Mme -Quirion.
Pour permettre au citoyen moyen de jouer un rôle actif dans la sauvegarde du patrimoine, il existe des organismes auprès desquels s’impliquer. « -Participer aux activités organisées par les initiatives du patrimoine bâti. Aller au musée de la région, devenir membre. Ce n’est pas dispendieux, c’est super intéressant. Ce sont de bonnes activités à faire en famille », encourage -Sophie -Quirion. De plus, il est toujours possible de participer aux réunions de conseil d’une municipalité et d’y faire valoir l’enjeu du patrimoine. Il est également possible pour n’importe quel citoyen de faire une demande au ministère de la -Culture pour qu’un bâtiment soit protégé.