Forêt, chasse et pêche au Québec : un lien fort et patrimonial
HISTOIRE. Enseignant et écrivain, Laurent Turcot présentait la conférence Forêt, chasse et pêche au Québec, le 30 octobre à Saint-Prosper, devant un public curieux et amoureux de la nature. En seulement 60 minutes, ses propos confirmaient l’importance de ces trois domaines dans notre ADN.
Nos premiers liens avec le patrimoine forestier remontent à l’arrivée des Européens, dans ce qui deviendra la Nouvelle-France. « Elle fait peur la forêt. C’est l’endroit où l’on se rétracte, où l’on se met à l’abri de la justice. C’est le repère des sorciers et des magiciens. […] C’est là qu’arrive le grand défrichement et la forêt en enclos, par l’imposition du modèle français », expliquait M. Turcot.
Des colons, avides de liberté, acquerront ce territoire en devenant coureur des bois. Eux et les autres Français s’intéressent aux matières premières, comme la morue et le castor, mais pas encore à l’exploitation forestière. Le blocus de Napoléon 1er, au début du 19e siècle, changera la donne. L’homme d’État désire ruiner le Royaume-Uni, en empêchant leurs échanges commerciaux avec le reste de l’Europe.
« On voit le début de chantiers maritimes importants. […] Les bûcherons, cageux et draveurs forgent l’image du canadien-français fort comme un bœuf et leurs légendes », affirmait M. Turcot, citant en exemple le bûcheron Jos Montferrand et la légende de la Chasse-Galerie.
Clubs privés
Dans cette notion d’occupation du territoire, les habitants procédaient à des chasses et pêches massives au point d’éliminer certaines espèces. C’est vers la fin du 19e siècle, dans un supposé souci de protection écologique, que naissent les clubs privés. Ces territoires demeuraient inaccessibles à la majorité des Québécois.
« En pleine révolution industrielle, les gens travaillent tous les jours pour de petits salaires. Ces clubs étaient contrôlés par de riches exploitants qui attiraient la noblesse et les touristes fortunés », précise Laurent Turcot.
Il faudra attendre les années 1970 pour assister au « déclubage » de ces endroits, menant à la naissance des zones d’exploitation contrôlées (ZEC). Au même moment arrivent la tradition des chalets et les parcs nationaux (SÉPAQ).
« On est face à une tradition inventée. […] Nous avions un lien de contraintes et d’empêchements face à un monopole contrôlant nos forêts. Plusieurs générations se sont battues pour nous redonner cette liberté », dit M. Turcot.
Selon lui, les Québécois possèdent une chance incroyable de profiter d’un aussi vaste territoire naturel, contrairement à d’autres pays restreints en faune et flore. Quant à l’exploitation forestière, il importe de l’encadrer adéquatement. « La sortie du film L’erreur boréale est un point déterminant à ce sujet », conclut-il.