Deux ans de pandémie : des défis demeurent pour les entreprises
Les deux dernières années de pandémie ont porté un dur coup à l’économie de certains secteurs, particulièrement au niveau commercial. Certains commerces sont d’ailleurs sur des assises fragiles, malgré toutes les aides gouvernementales proposées au cours de cette période.
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Marie-Josée Morency, coprésidente de l’Alliance des chambres de commerce de Chaudière-Appalaches, a constaté tous ces impacts, mais aussi observé une grande capacité d’innovation chez les commerçants.
« Dans le premier mois, il y avait plusieurs questions sans réponse. Des commerçants ont eu des difficultés, mais leur grande capacité à créer de la richesse les a forcés à se réinventer. Ils ont dû revoir leurs façons de faire et leur modèle, car la pénurie de main-d’œuvre existait déjà avant la pandémie. On a vu le virage se faire à certains endroits et ailleurs c’est plus lent. Certains ont modifié leurs heures d’ouverture pour éviter des dépenses inutiles et optimiser leurs opérations. »
Elle explique que les chambres de commerce ont travaillé à rester près de leurs membres pour aller chercher l’information et faire les sondages nécessaires pour mieux les accompagner.
« Il a fallu revoir nos façons de faire, mais il fallait demeurer accessible. Plusieurs ont été disponibles 24/7 pour répondre aux besoins et être présent, comprendre les besoins pour bien les transmettre. Nous sommes revenus sur nos missions premières. Nous avons organisé plusieurs tribunes avec les gouvernements pour qu’ils aient des réponses rapides. Nous avons mis sur pied plusieurs webinaires d’information. Il y a eu plusieurs initiatives d’achat local depuis 2020, pour s’assurer que les entreprises accèdent au Web et autres. »
Deux réalités distinctes
Directeur général de Beauce-Centre Économique, Daniel Chaîné observe que la pandémie a permis à des organisations comme la sienne de se rapprocher à la fois de leurs clients, mais de découvrir d’autres facettes du milieu des affaires.
« Historiquement, nous étions surtout impliqués avec les entreprises manufacturières, sauf que tout ça nous a permis de nous rapprocher des gens des commerces et des services. On les côtoie, mais un peu moins de par notre identité et du fait que ce sont surtout les chambres de commerce qui s’en occupent. »
Hélène Latulippe, directrice générale du Conseil économique de Beauce, constate d’ailleurs qu’il y a deux réalités différentes. Si les entreprises manufacturières se portent très bien, certaines ayant même enregistré des productions record, il en va autrement dans le domaine des commerces de service où les fréquentes fermetures et réouvertures ont créé beaucoup d’instabilité.
« Après avoir perdu leurs employés lors d’une fermeture, plusieurs ont dû en embaucher de nouveaux et les former lors des réouvertures. En ajoutant l’inflation et les difficultés d’approvisionnement, cela force la plupart d’entre eux à revoir leurs coûts de revient et ajuster leurs prix pour être en mesure d’arriver, tout en limitant ces hausses. »
L’aspect humain au coeur des rencontres
Le travail des organismes de développement économique du territoire ne se sera pas limité à gérer les aides gouvernementales disponibles. Le côté humain a été partie intégrante des deux dernières années, résume Daniel Chaîné.
« Ce sont des dossiers très émotifs. Nous ne sommes pas habitués à gérer autant d’émotions dans nos dossiers habituellement. C’est un autre défi professionnel pour notre équipe. Nous n’avons pas encore perdu d’entreprise à première vue, les entreprises se relèvent, malgré qu’on sente une hésitation de la clientèle à certains niveaux. »
Pour certains commerces, la prochaine année pourrait être difficile à franchir en raison de la fin des aides gouvernementales et des remboursements prévus à cet effet. Marie-Josée Morency espère d’ailleurs que les entrepreneurs ont commencé à s’y préparer.
« L’effet boomerang s’en vient et si les entrepreneurs ne sont pas prêts et n’anticipent pas ce qui s’en vient, ça pourrait être néfaste. On fait beaucoup de sensibilisation déjà. Les effets de la pandémie vont demeurer un certain temps. Ce n’est pas un retour prochain à une certaine normalité qui va faire que tout va revenir comme avant, au contraire, car plusieurs demeurent anxieux vis-à-vis ce retour à la normale. »
Hélène Latulippe remarque elle aussi que la plupart des entrepreneurs poursuivent leurs activités, malgré les embûches qu’ils ont dû traverser. La prochaine année dictera l’avenir de plusieurs.
« On aurait pu s’attendre à plus, mais on peut penser que les subventions ont permis d’aider certaines entreprises qui étaient peut-être sur un respirateur officiel. Je pense que l’on verra les vrais impacts de tout cela au cours de la prochaine année. »
Si la tendance au commerce de proximité s’est développée davantage au cours des 24 derniers mois, l’achat local n’est pas un acquis non plus, prévient Marie-Josée Morency.
« Nos entreprises n’ont pas encore complété leur virage sur le Web. Il y a plusieurs initiatives favorisant la présence des commerces sur Internet, car il faut qu’elles accélèrent leurs démarches. Sur le côté humain, on a un gros travail à faire. Les entreprises ont dû prendre les grands moyens pour devenir et demeurer attractives, car la rareté de la main d’œuvre demeure un enjeu. Elles doivent assurer une rétention et prendre davantage soin de leurs employés. Ce côté-là est positif. »
* Avec la collaboration de-Serge Lamontagne